MIDEM , l'industrie musicale à la peine...(info Libération)
La musique sans disque
Distributeurs de musique en ligne, lundi à Cannes. REUTERS
Le boom du numérique ne comble pas la chute d'un marché physique vieillissant. Réunie au Midem de Cannes, l'industrie musicale peine à trouver un modèle viable.
Par Christophe ALIX
QUOTIDIEN : samedi 27 janvier 2007
Cannes envoyé spécial
Beaucoup d'interrogations, un nombre inversement proportionnel de réponses, mais une profusion de pistes nouvelles. Le 41e Marché international de la musique de Cannes a fermé ses portes, jeudi, sur un constat d'incertitude quant à l'avenir d'une industrie en plein marasme. Entre 2000 et 2005, le secteur a perdu 23 % de sa valeur et ce mouvement s'est poursuivi en 2006 ( 10,7 % pour la France). Même s'ils ont atteint l'an dernier 2 milliards de dollars à l'échelle de la planète, les revenus de la musique numérique (Internet et téléphonie mobile) sont encore très loin de compenser la chute du marché physique.
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Plus personne ne pronostique le retour d'une croissance positive avant l'horizon 2011-2012. L'industrie de la musique d'après le CD cherche les nouveaux modèles économiques qui lui ouvriront le chemin vers la terre promise du numérique. «Il n'y aura pas un seul modèle économique mais plusieurs, analyse la directrice du Midem, Dominique Leguern. Personne ne peut prédire lesquels, c'est trop compliqué dans un monde où les technologies avancent si vite que les maisons de disques doivent s'adapter tous les jours.» Entre les espoirs fondés sur la manne publicitaire et le développement de nouveaux services mixant toutes les formes de consommation musicale, décryptage de deux nouveaux modes de financement.
La publicité
Si les internautes consomment de plus en plus de musique en passant de moins en moins par la case porte-monnaie, pourquoi ne pas recourir à la publicité pour la leur faire payer différemment ? «On n'invente rien, c'est le modèle de la radio», explique Jacques Attali, présent à Cannes pour exposer ses vues sur l'avenir de l'industrie musicale.
A l'image de Yahoo, de nombreux sites proposant de l'écoute de titres en streaming (en direct et sans téléchargement) s'y sont déjà mis. Fonctionnant comme un mix de radio et de robinet à clips vidéo largement personnalisables, ces sites, très prisés des adolescents, sont gratuits et connaissent une audience croissante. «C'est le modèle le plus facile à mettre en place et de loin le plus développé chez nous , l'utilisation du Net comme nouveau canal de diffusion», explique Bob Roback, le patron de la musique chez Yahoo. Mais la pub va plus loin. Le site de P2P SpiralFrog a récemment signé un accord avec Universal et EMI outre-Atlantique pour diffuser gratuitement leur musique contre l'incrustation de messages publicitaires au début des morceaux. Un modèle prisé par Intent MediaWorks. Son patron, Les Ottolenghi, fait le pari que les internautes sont disposés à accepter de la publicité bien encadrée contre la gratuité des contenus musicaux sur les sites P2P. Débuté il y a trois ans avec 1 000 titres en catalogue, son modèle consiste à joindre une publicité à des titres postés sur les sites de P2P. « Il y a deux ans et demi, seulement 9 % des gens qui découvraient nos titres acceptaient de les télécharger avec de la publicité, explique Les Ottolenghi, aujourd'hui ce chiffre est passé à 85 %, la preuve que les internautes ne sont pas forcément publiphobes.»
La souscription
Rhapsody, Yahoo, les français MusicMe et depuis peu la Fnac... Après les expériences malheureuses des majors au début 2000, les offres de souscription à des services musicaux de consommation illimitée de plusieurs centaines de milliers de titres font leur grand retour. «On n'a pas besoin de tout télécharger, explique Ludovic Leu, de MusicMe. Ce modèle de location de la musique suffit dans la plupart des cas. Quitte à télécharger à l'unité lorsque l'on veut véritablement avoir un titre à soi.» Protégés par des verrous anticopie ou DRM interdisant toute duplication, ces formules d'abonnement ont un inconvénient : lorsqu'on cesse d'y souscrire, en général au prix d'une dizaine d'euros par mois, l'accès aux titres s'arrête net, y compris pour les titres transférés sur un autre support de lecture. A l'avenir, ces services devraient combiner l'accès à une écoute illimitée du catalogue en streaming avec des forfaits permettant de télécharger un nombre limité de titres d'une manière définitive, sans DRM. Les indépendants l'ont compris. Optant de plus en plus massivement pour la vente à l'unité en MP3, ils s'y sont convertis.